A lire article de "marseille le magazine"
Rébia Benarioua, un Elu de terrain
Conseiller Général des Bouches-du-Rhône délégué à la Politique de Soutien à la Vie Associative, Rebia Benarioua s’investit depuis son entrée en politique dans la vie des quartiers.
Marseille le Mag’ : Vous représentez le Canton Notre-Dame Limite au Conseil Général, mais vous êtes également Conseiller Municipal de Marseille, comment vivez-vous ces deux casquettes ?
Rébia Benarioua : Cela se conjugue très bien. À la Mairie, je suis un élu PS dans une collectivité à majorité UMP, aussi nous essayons de n’être pas seulement dans l’opposition, mais d’être force de proposition. Au Conseil Général, notre ambition avec Jean-Noël Guérini est de faire de la politique volontariste, d’aller au-delà de ce qui est traditionnellement dans nos attributions. C’est le cas par exemple lorsque nous dotons les hôpitaux, alors que ce n’est pas une obligation.
Marseille le Mag’ : Quel est le rôle de votre délégation, au sein du Conseil Général ?
Rébia Benarioua : Les associations ont la possibilité, à partir du mois de septembre, de retirer un dossier de demande de subvention pour l’année suivante. Elles doivent fournir un certain nombre de documents, des bilans comptables, une description de leur activité, puis les dossiers sont instruits par nos agents, lesquels font des propositions aux délégués. En 2008 nous avons mis en place un dispositif de contrôle : dès qu’un budget dépasse un certain seuil, l’association est auditée. En tant que politiques, nous sommes très sollicités, et nous prenons un maximum de précautions pour ne pas être pris en défaut. J’aime citer Georges Marchais, qui disait : « La confiance n’exclut pas le contrôle. » Au Conseil Général, nous avons un outil extraordinaire : les référents associatifs qui sillonnent le département, connaissent extrêmement bien le secteur et suivent très précisément les projets.
Marseille le Mag’ : vous-mêmes, vous êtes beaucoup sur le terrain ?
Rébia Benarioua : Jusqu’en 2010, j’étais délégué aux Centres Sociaux : autant vous dire que je connais de près la vie des quartiers, les CIQ, les structures qui s’investissent. Dernièrement a eu lieu la 3e Fête des Vendanges à Saint-Antoine : c’est l’occasion de faire revivre les traditions provençales, les vieux métiers. Ce type d’initiative prend de l’ampleur, chaque année on attend plus de gens. Au Conseil Général nous sommes attentifs à ce que les quartiers restent vivants.
Marseille le Mag’ : Quelles sont les spécificités de votre secteur ?
Rébia Benarioua : Notre jeunesse n’est pas formée, et quand elle parvient à obtenir des diplômes, c’est pour rencontrer des difficultés au niveau de l’accès à l’emploi. Quand je suis arrivé à Marseille, à l’âge de 9 ans, il n’y avait pas encore de fossé entre les quartiers du nord et du sud. Pendant les 30 glorieuses, on quittait une entreprise pour en trouver immédiatement une autre, c’était l’âge d’or du plein emploi. Moi-même j’ai très peu été à l’école, et voyez où j’en suis !
Marseille le Mag’ : Comment êtes-vous entré en politique ?
Rébia Benarioua : J’ai pris goût à la politique lors des visites des élus socialistes dans notre délégation à la fin des années 70. Je me suis impliqué, j’ai voulu donner un coup de main, puis j’ai été responsable de section, directeur de cabinet de tel ou tel conseiller général ou député, et j’ai ainsi tissé mon réseau. Mon origine - je suis le seul élu d’origine musulmane - n’a pas été un frein. Les électeurs n’ont pas tenu compte de mon nom, mais de mes compétences.
Marseille le Mag’ : Comment voyez-vous l’avenir de Marseille ?
Rébia Benarioua : Marseille a beaucoup de retard par rapport aux autres grandes villes, au niveau des transports comme dans bien d’autres domaines. Nous avons été oubliés par les gouvernements successifs. Aujourd’hui, Marseille se développe avec ses petits moyens, et il est regrettable que nous n’ayons pas un homme à la hauteur de cette ville, comme Alain Juppé à Bordeaux par exemple. Il serait souhaitable de rentrer nos drapeaux dans nos poches pour donner un grand avenir à Marseille, au-delà des appartenances politiques. En ce qui concerne la refonte des collectivités, j’espère simplement, dans l’intérêt de nos populations, que la réforme territoriale n’ira pas jusqu’au bout.
Marseille le Mag’ : Avant de conclure notre entretien, y-a-t-il une cause qui vous tienne particulièrement à coeur, et dont vous auriez envie de parler à nos lecteurs ?
Rébia Benarioua : Oui,j’ai perdu ma mère lorsqu’elle avait 76 ans, j’étais très attaché à elle, et je peux dire que je n’en ai pas profité. Le jour où elle nous a quittés, je me suis attelé à ce que nos aînés deviennent une priorité. Créer des clubs seniors supplémentaires dans les secteurs, provoquer cette mixité qui est la force de nos quartiers... parce que se connaître, c’est finir par s’apprécier. On finit toujours par s’apprécier.
Propos recueillis par Gaëlle Cloarec